La relation aux écrans : stop ou encore… ?

60% des français regardent leur smartphone ou tablette dès le réveil, 37% des actifs utilisaient les outils numériques professionnels hors de leur temps de travail en 2016, 41% des français consultent leur téléphone mobile pendant la nuit, 75% des adolescents possèdent un smartphone qui leur permet d’accéder à Internet,… autant de statistiques* qui questionnent sur l’usage des écrans par les adultes, les professionnels et les plus jeunes.

S’ajoute à ces données, un événement sans précédent à savoir les épisodes de confinement liés à la pandémie du coronavirus. L’usage des technologies, des outils numériques a de fait évolué de façon exponentielle pour diverses raisons : assurer la continuité pédagogique au niveau scolaire, maintenir l’activité professionnelle chez les actifs, permettre l’accès à la culture (visionnage de films, lecture de livres numérique), disposer de plateformes ludiques pour toutes les tranches d’âge, rompre l’isolement en permettant de communiquer avec ses proches ou ses amis grâce aux réseaux sociaux, etc.

Les ressources proposées par les écrans sont sans limites… mais cette absence de limites n’est-elle pas justement aussi un problème ?

Il est clair aujourd’hui que les formats, programmes diffusés sur nos écrans sont perpétuels : que ce soit à la télévision, sur ordinateur ou via le smartphone, tout contenu visionné succède à un autre ; plus rien ne marque clairement la fin d’une histoire dès lors qu’un autre programme est déjà annoncé ou débute sans transition (souvenons-nous d’un temps pas si éloigné où les génériques de fin de film duraient longtemps, au point d’avoir le temps d’engager une discussion avec l’entourage sur ce que l’on venait de regarder…). Les images ne sont plus réellement choisies par celui qui les regarde ; elles sont parfois proposées par la machine dont l’intelligence artificielle a enregistré les préférences de son utilisateur. Et cette suggestion de l’appareil enraye par là même le désir, l’envie de rechercher et découvrir.

Essayons d’imaginer l’influence de ces constats dans le comportement d’un jeune utilisateur ou d’un adulte : pas vraiment de fin à l’histoire mais une succession d’images proposées (et non recherchées) qui alternent entre contenus adaptés à l’âge du public, et contenus nocifs. Quel temps pour prendre du recul sur ce qui a été vu alors que d’autres propositions sont faites, voire déjà amorcées ? Quel impact sur le comportement de celui qui regarde et éprouvera diverses émotions (alternant rire, angoisse, peur, etc) sans avoir de moment pour y mettre des mots ? Ces changements d’états, liés aux images que l’on regarde ne feront-ils pas naître chez un adolescent notamment, de plus en plus de mouvements d’humeur (du calme à l’agressivité, de la sérénité à l’anxiété) dans des situations du quotidien ? Enfin l’absence de cadre dans l’usage des technologies ne risque-t-il pas de détruire les rituels nécessaires à l’épanouissement de chacun : la convivialité d’un repas en famille, un sommeil réparateur et donc moins perturbé par le son ou la lumière d’un smartphone, des loisirs qui profitent à chacun sans que le stress ou la performance induits par le travail ne s’invitent suite à la réception d’un mail professionnel ?

Plus que de subir la présence des écrans dans la vie de tous les jours, prenons aussi le temps d’interroger ce qu’ils apportent. Intéressons-nous à ce que les adultes y pratiquent, à ce que les jeunes regardent: il suffit de le leur demander et leur réponse à ce moment-là sera précieuse. Cette réponse peut être un mot sur ce qu’ils ressentent, un moment d’échange et de partage, la fin que l’on donne à un espace qui n’a pas de limites. 

*Source : Deloitte